Il s'était rendu compte de la supercherie et mon frère m'avait averti. J'espérais juste qu'il avait lui aussi réussi à fuir. Je n'avais pas ressenti d'intense douleur du coup je savais qu'il ne s'était pas battu. Je savais aussi qu'il allait venir me chercher. Mais hors de question de fuir. Si je le faisais, il traquerais et tuerais tous ceux et celles auxquels je tiens. Et ça il en ai hors de question. Je ne veux pas qu'ils courent un danger. Du coup je l'ai laissé venir à moi. Sur le perron de cette église.

Cette même église où je viens d'aller prier pendant une heure. Non pas que je crois en cette entité supérieure qu'est Dieu, mais je voulais au moins que quelqu'un comprenne pourquoi j'agissais ainsi. Et peut-être que j'espérais aussi un peu qu'un miracle arrive. Que d'un coup je sois assez fort pour le battre, qu'il soit clément ou un truc du genre.

Et puis je l'avais senti. A la tombée de la nuit comme je m'en doutais. Il était venu seul. Je su alors que je ne passerais pas la nuit. La trahison que je venais de faire était celle de trop. Je me levais du banc sur lequel j'avais pris place et sortais. Il avait déjà muté. Une peau noire, une émanation de puissance infinie. Je tressaillais, tremblais de tous mes membres. Je mutais et rugissais alors qu'il se précipitais vers moi. J'esquivais un premier coup, un second mais le troisième me heurta avec une puissance inouïe.

Je heurtais une gargouille quelques mètres plus haut. Du sang s'échappa de ma bouche. Je me rattrapais de justesse tombant sur mes quatre pattes. Mais déjà il m'attendais à mon point d’atterrissage. Visiblement il voulait en finir vite. Ses griffes se plantèrent profondément dans mon dos. Je crachais encore plus de sang. Il les ressorti et je hurlais de douleur. Je redevenais humain et m'étalais lourdement sur le sol. Il souleva ma tête par les cheveux et sa main s'abattit sur mon cou.

Il s'éloignait de moi alors que je sentais ma vie m'échapper. Mes yeux s’embouèrent. Je savais que mon frère avait lui aussi ressentis cela. Au loin j'entendis un hurlement de désarroi puissant. C'est là-dessus que ma vie m'échappa. Sur un hurlement déchirant à faire chavirer n'importe quel cœur, même de pierre, et des larmes se mêlant à mon sang. Ainsi, mon miracle n'était pas arrivé. Mais je rejoignais l'enfer avec une assurance. Il ne s'en prendrait pas ceux que j'aimais. Ce n'était pas dans ses habitudes s'il avait ce qu'il voulait. J'espérais aussi avoir le sourire en m'endormant pour ce long et éternel voyage.

Lors de cette soirée où l'atmosphère était pesante, j'avais décidé de me faire un film et de manger chinois par la même occasion. Vous allez certainement me dire, mais pourquoi toute seule ? On n'est pas obligés d'être à deux pour faire ces choses-là, pour ma part c'est devenu une habitude. Vous savez, quand vous êtes solitaire depuis un bon moment, vous n'avez plus du tout peur d'être tout seul, c'est même l'exact opposé. Je marchai tranquillement des rues tout en repensant aux derniers évènements, je venais d'emménager dans cette ville, de retrouver mon meilleur ami, de savoir que la meute alpha était dans les parages et que d'étranges sacrifices se faisaient... Quelque part, j'étais inquiète et à la fois fatiguée, inquiète, car ne sachant pas vraiment j'avais la sensation que quelque chose clochait et fatiguée d'avoir corrigé des copies ainsi que d'écouter cette stupide réunion de prof. Bon, je sais que c'est mon travail, mais parfois c'est barbant, ils pourraient mettre de l'ambiance dans leur réunion je vous le dis.

Soudain, alors que j'allais prendre la direction menant à mon appartement, une odeur de sang me titilla le nez et ne pouvant pas empêcher ma curiosité, j'ai suivi cette odeur. Elle me mena directement devant une église où au fur à mesure que je m'approchai, je découvris avec horreur un corps tâché de sang noir, je devais en conclure que c'était un loup-garou. Tenant à savoir s'il était mort ou en vie, j'écoutai son pouls, il était toujours en vie mais faible. Je ne savais vraiment pas quoi, si je restais là ce garçon allait vraiment mourir et si je décidai de le soigner, j'ignore s'il sera un danger pour moi. Prendre le risque de faire confiance à quelqu'un c'est prendre le risque de se faire trahir, je devais faire un choix et vite ! Regardant de droite et de gauche, je n'ai pas hésité plus longtemps que cela, je l'ai pris avec moi, par chance j'arrivai à le porter jusqu'à mon appart, néanmoins avec difficultés. Intérieurement, je remerciai le ciel d'avoir versé ses larmes pour nettoyer les traces de sang noir menant jusqu'à mon chez moi, je le déposai sur le canapé et me mit au soin.

La mort vint me chercher bien vite. Mais avant qu'elle ne me prenne, j'avais senti le désarroi et la tristesse de mon frère s'insinuer dans mon cœur. J'aurais voulu lui crier que j'étais désolé, que je m'excusais. Mais maintenant, il fallait qu'il fasse sa route tout seul. Depuis tout petit c'était lui qui m'avait soutenu. Il avait toujours eu un caractère bien plus prononcé que le mien. J'étais celui qu'il fallait couver et protéger. Et il s'était acquitté de cette tâche avec brio. A partir de maintenant ce serait à moi de le protéger depuis l'au-delà.

D'ailleurs je sentais comme de la pluie me tomber dessus alors que la grande faucheuse me trimbalait sur son épaule. J'allais donc partir alors que les cieux versaient des larmes. Peut-être que mon miracle était là après tout. Peut-être Dieu avait-il décidé que j'étais digne de son royaume. Je me foutais d'où je pouvais atterrir du moment que je pouvais protéger ceux qui comptaient pour moi.

Bientôt le noir qui embuait mes yeux s'intensifia et je me retrouvais dans les ténèbres les plus pures. Ainsi donc c'était ça la mort. Une noirceur si parfaite que ça en paraissait presque beau. J'avais l'impression que rien ne pouvait sortir de ce lieu. Je l'arpentais. Mes blessures avaient disparues. Je regardais partout autour de moi. Mais rien n'apparaissait. J'avançais à l'aveuglette. Rien. Absolument rien. Puis soudain, mon frère apparu. Visiblement paniqué. Il était blessé. Il se tenait l'épaule qui semblait saigner abondamment. Et Deucalion apparu dans son sillage. Je courrais le rejoindre. Mais j'avais l'impression d'être retenu. Je courrais. Mais la distance entre nous ne diminuait pas. Deucalion avait muté. Ses vêtements étaient plein de sang. Visiblement mon frère c'était mieux battu que moi.

Il rattrapa Aiden et le lança violemment. Mon frère atterri lourdement sur le sol alors que le loup démon sautais et lui retombais dessus lourdement. Un horrible craquement se fit entendre. Aiden émit un bruit sourd et du sang sorti de sa bouche en un flot continue. Puis son regard se vida de toute étincelle de vie. Je hurlais.

Une lumière vive apparue alors. Ainsi que le visage d'une femme blonde ravissante. Un ange ? J'étais au paradis ? Visiblement j'avais un peu abimé les alentours. Il y avait du sang partout, ainsi que des marques de griffes. Puis de nouveau je sombrais dans les ténèbres. Apparemment je venais d'épuiser les maigres forces que j'avais. Cependant je sentais les larmes couler abondamment de mes yeux :

"Aiden je suis navré. Je voulais pas...Je....."

Ma tête retomba lourdement contre quelque chose de moelleux. J'espérais juste retrouver mon frère. Il allait arriver j'en étais sur.

« Aiden je suis navré, je voulais pas … Je… »


Je l’entendis murmurer cette phrase, ce gamin s’était sacrément fait battre et sûrement par un autre alpha vu les blessures et la difficulté de cicatriser, cela prend plus de temps pour la simple raison qu’un alpha est fort. Un bêta, un oméga ou même un autre alpha blessé par un alpha plus fort met du temps à se remettre ou soit s’il n’a pas ce temps-là il meurt. Heureusement, j’ai pu découvrir ce garçon juste à temps, en ce moment sur mon canapé en train de plonger dans un sommeil profond au point de croire qu’il est dans le coma. Me levant, je préparai un seau d’eau clair avec des serviettes afin de le nettoyer de ses blessures méconnaissables avec tout ce sang noir qui a coulé. Passant délicatement sur son torse, tout en veillant à ce qu’il ne s’agite pas trop durant son rêve sans vraiment rêver. Je pense bien qu’à cette heure-ci, ce garçon devait vivre des cauchemars ou se répéter la scène du combat dans sa tête. Une fois le nettoyage finit et après avoir recousu ses cicatrices, je décidai de prendre rapidement une douche afin de me nettoyer à mon tour et d’enfiler une tenue plus casual, en revenant du salon, le garçon commençait à bouger. Signe qu’il n’allait pas tarder à se réveiller.

Je me réveillais de nouveau en sursaut. Je venais de rêver de mon combat avec Deucalion. Une douleur vive traversa tout mon corps. Puis un liquide s'échappa de mon torse. Je portais la main sur la blessure et constatais qu'elle saignait. La même jeune femme blonde me regardais. Je plongeais mes yeux dans les siens. Elle semblait rassuré que je me réveille. J'émettais d'une voix faible :

"Où suis-je ? Mon frère ? Il est où ?"

Je tentais de me lever mais je retombais dès que je m'appuyais sur ma jambe. Je regardais mon torse. Toutes mes blessures avaient été refermées par des points de sutures. Ainsi, je ne pouvais pas cicatriser. Je m'étalais sur le sofa baignait de sang. Cela voulait-il dire que j'étais vivant ? Mais alors ce que j'avais ressentis pour mon frère....

Je tentais de me lever une nouvelle fois, faisant au passage céder quelques points de sutures. De nouveau mes forces me trahirent et je tombais contre la jeune femme :

"Pitié il faut retrouver mon frère. Où est mon portable ? Pitié pitié j'ai plus que lui....Je veux pas...."

Pris de panique je n'arrivais même plus à respirer. Je ne savais pas quoi faire. La souffrance que j'avais éprouvé dans mon sommeil m'inquiétait. Et s'il était là quelque part à attendre qu'on le sauve ? Et s'il était en train de vivre ses derniers instants ? Je fondais en larme en hurlant de toutes mes forces :

"PITIÉ.....PAS LUI.....J'AI PLUS RIEN....."

J'étais contre l'épaule de la jeune femme. Je pleurais tout mon saoul suppliant qu'il soit encore en vie.