Histoire

Je n'eus le temps de rien dire. Il me saisit et me poussa dans une ruelle sur le côté à l'abri de l'éclairage public. Il parlait, je vois encore ses lèvres bouger, mais je n'entends plus ce qu'il me dit. Ses mains parcouraient mon corps et moi, je tentais désespérément de me débattre, en vain. La seule chose que j'obtenais en retour était des coups violents, qui venaient me fracasser le visage. Lorsque je poussa un cri, il plaqua sa main sur ma bouche alors que l'autre arrachait habilement mes vêtements, comme s'il été déjà habitué à ce genre de situation. Brusquement, il me projeta contre le mur, que je heurtai en étouffant une exclamation de douleurs avant de tomber à terre. Il ne lui en fallut pas plus, il se jeta à nouveau sur moi, tout en détachant la ceinture de son pantalon. Son odeur me donnait des hauts le cœur, et le poids de son corps sur le mien, si frêle en comparaison, m'écrasait. J'étais incapable de bouger, incapable de respirer ou de hurler, le souffle coupé par son poids. Sa respiration haletante et roque venait me fouetter le visage et chaque coup de reins de sa part, me déchirer le ventre un peu plus. Ne renonçant pas à me défendre, mais incapable de bouger mes bras, je fis la seule chose qui me traversa l'esprit. J'avançai mon visage vers le sien et le mordit à pleine dents. Serrant de toutes mes forces, je sentis le goût froid du sang dans ma bouche tandis qu'il eut un mouvement de recule en hurlant. Je lâchais prise et pu percevoir brièvement que j'avais bien entamé sa joue. J'eus juste le temps de lui cracher au visage avant que les coups ne pleuvent. J'entendis distinctement le craquement de mes côtes et une fois de plus mon cri de douleurs resta coincé dans ma gorge.  « Salope ! » C'est le seul mot dont je me souvienne. Soudain, quelque chose, probablement un bruit, attira son attention derrière lui et après un ultime coup de pied, il s'enfuit m'abandonnant sur le bitume froid. Je tentais de me redresser mais je n'y parvins pas, pas plus que je ne réussis à sortir un son de ma bouche autre que le bruit fort et saccadé de ma respiration qui m'échappait peu à peu. J'étais allongée par terre, à moitié nu, sali par cet homme et j'agonisais lentement mais sûrement. L'endroit semblait désert et je doutais fortement de mes chances de survis si personne ne me trouvait. Je perçus un bruit à mes côtés. Dans un léger sursaut, je repris l'espace d'un instant tous mes esprits, prête à me défendre, dans la mesure de mes moyens, s'il le fallait. Mais face à moi, ce ne fut pas mon agresseur que je vis mes deux yeux rouges sang qui me scrutait avec avidité. Le cauchemar n'était semble-t-il pas terminé. J'entendais un râle bestial s'émanait de la créature qui se trouvait devant moi. Etait-ce un homme ou un animal, je ne saurais pas dire. Lorsque la chose eut un mouvement vers moi, j'eus le réflexe de porter mon bras devant mon visage. Je sentis alors les crocs fendre ma chair. Un faible gémissement fut tout ce que j’eus la force de répondre.  Mon bras retomba mollement à mes côtés, la morsure contre le sol. La créature s’apprêtait à me mordre à nouveau, lorsqu’un projectile le frappa en pleine tête. La chose s’écroula sur le côté tandis que d’autres flèches vinrent le transpercer. Quant à moi, je sombrais peu à peu dans l’inconscience. Mes yeux s’étaient fermés contre ma volonté. Je n’avais juste plus la force. Je sentais l’agitation autour de moi et j’entendais des brides de conversation.  « Est-elle en vie ? » « L’a-t-il mordu ? » « Doit-on la tuer ? Non, on l’amenè à l’hôpital et on la surveillera pour voir si elle se transforme»


Le lendemain.

Je me réveillais à l’hôpital, sans aucune idée de la façon dont j’y étais arrivé. Je me redressai dans mon lit avec une facilité étonnante. A côté du lit, sur une table, se trouvait un dossier portant la mention inconnue en face du nom et prénom. Je le saisissais et l’ouvrai. A l’intérieur se trouvait tout un tas de document concernant mes blessures et les soins qui m’avaient été apporté ainsi que des photos de polaroïd. J’examinai les photos et découvrais mes blessures. Mon visage était méconnaissable, gonflé et de couleur violette. Mon coup et mes épaules étaient griffés. Mon torse portait de très nette marque de coups. Mon bras une morsure d’une profondeur impressionnante. Quant à mes cuisses, on y distinguait très nettement l’empreinte des mains de mon agresseur. Chaque photo me remémorait un peu plus la scène. Je posai le dossier et me levais lentement avant de me dirigeai vers la salle de bain. Une fois à l’intérieur, j’enlevai ma blouse de patient et me tournai vers le miroir. Prête à affronter la réalité de mon corps détruit. J’eus un mouvement de recul, lorsque je m’aperçu. Il n’y avait rien. Pas une trace de coups. Pas une égratignure. Pas une cicatrice. Rien. J’arrachai le bandage autour de ma cage thoracique toujours rien. Ma respiration s’accélérait. C’était impossible. Soudain, mon regard se porta sur mon avant-bras et j’enlevai doucement le pansement. Une fois de plus, ma peau était intacte. La morsure avait tout bonnement disparu. Prise de panique. J’enfilai à la hâte des vêtements qui se trouvait dans l’armoire de la chambre et m’enfuis emportant avec moi le dossier.
Comme d’habitude mes parents n’étaient pas là lorsque je finis par rentrer à la maison. J’avais passé le plus clair de ma journée à tourner en rond dans ma chambre alternant des phases d’incompréhension et de réflexion et d’autres de pleures incontrôlés, prostré dans un coin de la chambre.  Je fixai et relisai les éléments de mon dossier, sans cesse. C’était bien mes côtes qui étaient brisées sur ces radios. C’était bien moi sur les photos. Et, les descriptifs de mes blessures et des soins que l’on m’avait apportés étaient bien réelle. La nuit était tombée lorsque je sorti enfin de ma torpeur et réalisa que mes parents étaient là. Si mon agression avait eu raison du peu d’innocence, de confiance en soi et d’amour propre qu’il me restait, il semblait que j’étais toujours aussi stupide et naïve. Je crus bêtement que pour une fois dans leur vie mes parents allaient agir comme tel, allaient se soucier de moi. J’allai donc à la rencontre de ma mère en train de se préparer pour un énième sortis dans sa chambre. Ni mon visage ravagé par mes pleures de la journée, ni l’expression étrange dans mon regard, empreint de douleur et de honte, qui hurlait à l’aide, n’éveilla une quelconque réaction de sa part. Péniblement après un moment de silence, je lui racontais mon agression. Ma voix était défaite, presque implorante. Elle se contenta de me regarder grâce à son miroir en arquant un sourcil et lâchement froidement « Je n'ai pas le temps pour tes histoires. Cesse tes enfantillages ! » Interloquée, je restai bouche-bée tandis qu'elle quittait la pièce en annonçant joyeuse à mon père « Chéri, je suis prête. On peut y aller. » Au loin, je l'entendis rajouter en riant : « En fait, tu ne connais pas la dernière. Ta fille s'est fait agresser et violer la nuit dernière. Elle a même été mordu par une créature aux yeux rouges. »


Quelques jours plus tard.


J'avais passé les derniers jours enfermés dans le noir dans ma chambre. Dès que je dormais, je revivais la scène. Dès que je fermais les yeux ne seraient-ce qu'une demi-seconde, les images se mettaient à défiler sur mes paupières. Cette nuit me hantait. Je devenais folle, ruminant ma douleur et ma colère. J'avais mal mais pas uniquement à cause de cette nuit. Je souffrais car je venais de comprendre ce que je m'appliquai à ne pas voir depuis des années : mes parents ne changeraient pas. Je n'aurais jamais aucun intérêt pour eux et il faudrait que je vive avec. Usée de pleurer et de rester prostrée dans ma chambre, j'avais fini pas prendre une décision : je survivrai. Je survivrai à leur indifférence, mais aussi et surtout à mon agression. Et pour cela, je devrai m'éloigner de cette ville et surtout partir le plus loin possible de mes géniteurs. Ces derniers étaient partis en week-end, je ne sais où. Me laissant une fois de plus seule à la maison. En l'espace d'une journée, j'avais tout organisé. Mon grand-père à sa mort l'année passé m'avait légué tout ce qu'il possédait. Il avait sans doute été pour moi ma seule vraie famille et je suis presque persuadée que sa brouille avec mes parents étaient dû à leur comportement envers moi. Bref. Il m'avait donc laissé l'ensemble de son argent, mais aussi et surtout de ses biens, y compris sa maison. Je partais donc vivre bien loin des tumultes de Los Angeles, à Beacon Hills chez mon grand-père ou devrais-je dire chez moi. La veille, j'avais fait le tour des compagnies de déménagement jusqu'à finir par en trouver une qui accepte de venir dès le lendemain. J'avais donc passé la nuit à emballer mes affaires. Ils arrivèrent comme promis à 8h pile, à mon grand soulagement. Ma décision était prise sur un coup de tête, mais je ne voulais pas me laisser le temps d'en changer, mon instinct me disait que j'avais raison de partir là-bas. Je leur indiquai quoi prendre et sachant pertinemment que mon départ ne ferait probablement rien à mes parents, je décidai donc on passage de tapait là où ça leur ferait mal : dans leurs affaires. J'emportais donc avec moi certains des objets auxquelles ils tenaient particulièrement. Je venais d'attraper un vase hideux que ma mère adorait par-dessus tout, probablement à cause de son prix exorbitant quand un des déménageurs posa sa main sur mon épaule pour me poser une question. En l'espace d'un quart de seconde, mon corps tout entier se raidit et j'eus un vif mouvement de recule. La respiration saccadée, je posai un regard paniqué sur l'homme qui me regardait perplexe. Il amorça un second mouvement vers moi en me demandant si ça allait. J'esquivai rapidement en disant d'un ton froid et sans appel : « Ne me touchez pas ! » Il me dévisagea, me prenant sans doute pour une folle. Me rendant compte, de l'étrangeté de la situation, je marmonnai une excuse avant de partir dans une autre pièce en marchant au passage sur les débris de vase que j'avais fait tombée. Quelques instants plus tard, le camion partait en direction de Beacon Hills quant à moi, je n'allais pas tardait à le suivre, mais avant, j'avais une dernière chose à faire. J'attrapai un des précieux clubs de golf de mon père et massacrai allégrement la maison et les objets qui s'y trouvaient. J'extériorisai la rage que j'avais pour mes parents et leur laisser ainsi un souvenir de moi. Après avoir tagué sur l'un des murs du salon un message plein d'amour et de reconnaissance à l'attention de mes parents, je partais en compagnie de mon chien en laissant la porte grande ouverte.